4e Congrès de la CMA

Apprendre le français : un projet personnel, un projet de vie

24 - 28 juillet
Agadir 2018
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Argumentaire

Apprendre une langue, en l’occurrence le français, peut, conformément à la thématique choisie pour ce congrès, constituer un « projet de vie ». Le terme « projet », issu du latin proiectus, désigne l’ensemble des activités coordonnées entre elles cherchant à atteindre un objectif déterminé. Selon le Petit Robert, un projet correspond à l’ « image d’une situation, d’un état que l’on pense atteindre ». Par conséquent, pris dans un contexte socio-éducatif, un « projet de vie » traduit une pensée qui suppose la rencontre de deux facteurs : l’institution scolaire et le projet existentiel élaboré par une personne au cours de sa vie. C’est l’expression même d’une volonté de verser une touche personnelle, individuelle à des besoins, à des attentes et des aspirations spécifiques. On parle alors d’un projet  individuel, d’un projet personnalisé, bref, d’un projet de vie qui acquiert un sens. Comment alors l’école peut-elle prendre en compte la dimension individuelle du choix de la langue française dans le projet personnel ou de vie de l’apprenant ?
La langue française comme projet de vie implique qu’on ne peut dissocier l’apprenant ou l’enseignant, comme acteurs principaux de l’opération pédagogique, de leurs vies personnelles. L’institution scolaire qui abrite le processus d’apprentissage gagnerait alors à être un cadre de vie collective en favorisant l’épanouissement individuel de chacun, dans une ambiance de respect mutuel.
Des considérations sociales, culturelles, psychologiques ou personnelles peuvent constituer pour chacun des défis à relever en voulant apprendre le français.
Dans un monde marqué par les effets d’une globalisation farouche, où la concurrence sévit, la maitrise des langues s’avère une nécessité et une clé de voûte pour l’accès à l’emploi, sur un marché du travail qui valorise de plus en plus les compétences linguistiques, devenant, de ce fait, un critère incontournable de sélection, non seulement pour le recrutement, mais aussi pour la promotion professionnelle.
Par ailleurs, si dans certains pays arabes on opte pour la création des filières bilingues francophones (ou autres) allant jusqu’à leur généralisation, dans d’autres,  elles sont vouées au sort du provisoire. Choix politique dicté par de multiples raisons (enjeu économique important pour la plupart des pays du Maghreb, volonté d’ouverture aux autres cultures pour maints pays arabes du moyen orient et du Golfe), ces filières peuvent-elles constituer l’espace tout indiqué pour la réalisation des objectifs individuels des apprenants ? Quelle adaptation de l’enseignement pour que les FOS, FOU et l’intégration des TICE répondent aux motivations personnelles d’un projet de vie ?
Projeter d’enseigner le français peut également être considéré comme un projet de vie, un choix qui pourrait être fondé sur des motivations psychologique et sociale,  en raison de la valorisation du processus de  transmission du savoir à travers les générations. Investi d’un pouvoir symbolique et d’une mission socio-cultuelle, l’enseignant contribue à la transformation de la société et à son devenir, aidé en cela de ses compétences académiques et professionnelles, de son sens de l‘humain et de cette fenêtre ouverte sur d’autres valeurs que concrétise la langue française.
Ecrire en français peut aussi être un choix linguistique personnel et/ou motivé par une conjoncture historique, sociale et politique. Le cas des écrivains maghrébins et de ceux originaires d’autres pays arabes est très significatif à plus d’un égard, quand l’écriture mène à des projets de vie ou inversement. Quelle que soit la raison du choix du français comme langue d’écriture, le rapport au français, dans tous les cas, demeure problématique et continue encore de nourrir le débat.
Opter pour le français comme langue de travail, tel est le choix de beaucoup de professionnels de la communication (journalisme, édition, culture, communication, etc.). Ce choix implique des orientations, des contraintes et des obligations propres, qui marquent la vie des personnes concernées. Les radios privées francophones, à titre d’exemple, s’adressent-elles aux mêmes auditeurs que les stations arabophones ou anglophones ? Abordent-elles les sujets sociaux de la même façon ? Le français comme outil de travail est-il vraiment un choix neutre, purement pragmatique ?
Entretenir un rapport avec le français dans les pays arabes à travers l’enseignement ou au moyen d’une activité professionnelle ou autre, c’est poser constamment une question d’ordre identitaire, en rapport avec son statut. En effet ce dernier n’est pas le même dans ces pays et sa perception diffère selon les projets de vie. Cette situation implique des choix et des réalités différents. Pour des considérations historiques ou idéologiques, le rapport au français est toujours ambivalent : il peut être en effet un moyen de réussite et de promotion sociale et un outil d’exclusion ; il peut être perçu comme une langue d’ouverture ou comme un moyen d’acculturation et de domination. Le système éducatif gagnerait à favoriser un rapport serein avec la langue française qui serait alors considérée comme une langue internationale et comme une matière scolaire et non comme une langue marquée à jamais par des considérations historiques, qui risquent de la figer dans une situation de conflit perpétuel avec d’autres langues.